POURQUOI BIEN ÉCRIRE QUAND ÇA NE SERT À RIEN ?

Partie 1 – Perspective de l’écrivain

UN CONSTAT

En tant qu’auteurs, pourquoi devrions-nous atteindre tel ou tel niveau d’écriture ? Un constat s’impose : si nous rédigeons un journal intime que personne ne lira, cela a peu d’importance. Cependant, dès que l’on a l’intention d’en distribuer à notre famille ou à des amis, le lecteur, même s’il vous aime, doit pouvoir minimalement comprendre ce que vous composez. Si jamais ce n’est pas le cas, ils vous pardonneront.

Dans le cas où vous voudriez vendre votre publication et devenir le prochain auteur à succès, il doit exister un degré minimum d’écriture à considérer. Si, comme moi, vous vous êtes promenés dans plusieurs salons du livre, les grands comme les petites expositions à compte d’auteur, vous avez remarqué que le niveau des romans ou autres genres littéraires est très variable. Certains diront peut-être que les ouvrages de faible qualité sont le fait des joueurs autonomes. C’est malheureusement le cas, mais pas toujours, loin de là ! Force est aussi de constater que plusieurs livres produits par certains éditeurs auraient avantage à être un peu plus étoffés. Oui, mais, me direz-vous, certains de ces « mauvais livres » sont des succès littéraires. Encore une fois, c’est bien vrai. Mais comment cela se fait-il ? Peut-on penser que la qualité d’un manuscrit n’a pas d’importance ? Nous avancerons dans cette recherche avec l’attitude de celui qui se pose des questions et qui essaie de comprendre.

PERSPECTIVE DE L’ÉCRIVAIN

La pulsion d’écrire

Nous écrivons pour diverses raisons. Attardons-nous donc, en nous limitant le plus possible, aux différentes motivations qui poussent « notre écrivain » à se mettre au boulot. Les voici :

  • partager son vécu, sa vision de la vie, revivre un événement, se justifier ;
  • faire progresser la société, orienter le monde dans une certaine direction, pour la pérennité de l’histoire ;
  • partager ses loisirs, ses connaissances, pour instruire ;
  • se libérer de ses angoisses, de ses douleurs – pour trouver son identité, se valoriser, découvrir un sens à son existence ; donc:
  • pour une fonction thérapeutique (lire l’article « Vous êtes déprimé ? Écrivez ! » 1) ;
  • pour le plaisir, un besoin de créativité, pour une recherche de la beauté;
  • pour extérioriser son aptitude à synthétiser les matières, les informations (au sens large) ;
  • pour se faire des amis ; pour échanger ;
  • pour être entendu, pouvoir s’exprimer ;
  • pour être reconnu, être admiré, pour le prestige d’être écrivain ;
  • pour se venger ;
  • pour devenir riche en tant qu’écrivain (style de vie) ;
  • pour devenir riche (motivation entrepreneuriale).

Ces raisons correspondent toutes, évidemment, à un besoin personnel. Ce besoin est parfois tourné uniquement vers soi et parfois tourné vers le monde. La limite entre les deux n’est, il va sans dire, pas des plus limpide. Dans tous ces cas cependant, à première vue, rien n’indique une propension naturelle à rechercher le meilleur niveau de rédaction possible. Pour qu’elle vienne spontanément, l’envie de « bien écrire » doit pourtant être liée à nos motivations individuelles. Pour une personne dont le leitmotiv est d’extérioriser le beau ou qui compose par pur plaisir, elle aura sans doute une tendance plus ou moins consciente à optimiser son outil d’expression, le langage écrit. Pourquoi, d’entrée de jeu, ne nous vient-il pas tous à l’esprit d’apprendre à écrire ? Indirectement, nous avons peut-être déjà donné un élément de réponse. La nécessité d’exprimer un besoin profond ou un trait de caractère masquerait tout le reste.

Une autre composante du problème provient peut-être du fait que l’on croit qu’écrire, c’est facile. À ce sujet, je me souviens d’un reportage sur les auteurs à succès de romans à l’eau de rose. Une artiste prolifique discutait des commentaires qu’elle pouvait recevoir. En voici un qui m’a marqué : « Hun ! Je n’ai qu’à écrire un roman comme ça pour faire de l’argent ! » Elle leur répondait simplement : « Vas-y ! Fais-le ! », pour exprimer que ce n’était pas si facile. L’extrait suivant tiré d’un texte sur la formation d’écrivain explique en partie ce phénomène :

« Personne, pourtant, ne pense devenir peintre ou musicien en douze ou quinze heures d’« atelier ». Si l’écriture donne une telle impression de (trompeuse) facilité, c’est fort probablement parce que son matériau est le langage, la langue maternelle : un matériau dont tous ont fait l’apprentissage, et que plusieurs estiment maîtriser.  » D’où le préjugé tenace que tout le monde connaît le code de l’écriture… … Mais ce que tout le monde connaît – et de façon approximative encore ! –, c’est le code linguistique, pas le code littéraire. «  » 2

Et la personnalité ?

Notre personnalité et son pendant professionnel en particulier influencent-ils notre intérêt à améliorer notre écriture ? Regardons du côté d’un test d’aptitudes élaboré en fonction des affinités de chacun pour différents types d’emplois. Dans le test de Holland, pour ne pas le nommer, trois lettres définissent la prédisposition d’un individu à adopter un métier ou une profession.

Pour un écrivain, le code de trois lettres est AIS, pour Artiste, Investigateur et Social. L’aspect « Artiste » apparaît évident pour un auteur, mais le côté « Investigateur – aspect analytique » l’est tout autant puisqu’un individu avec ce trait de personnalité privilégie les activités intellectuelles et qu’il a aussi besoin de connaissances théoriques pour agir. Quelqu’un avec cette disposition cherchera sans doute à assimiler toutes les finesses de l’écriture.

Dans le test d’aptitude dont nous discutons, il existe six lettres (RIASEC) ou profils différents. Le profil R, par exemple, possède une certaine affinité pour les activités manuelles. Il aime exercer des actions concrètes, mener des expérimentations (mais pas uniquement, cela s’entend !). Une personne avec la combinaison AI aura assurément plus d’intérêt pour les subtilités de l’écriture et pour l’écriture tout court qu’une autre avec le profil ER (Entreprenant, Réaliste). Mais, s’il faut le dire, cela n’empêche personne d’écrire et de le faire correctement.

Si nous nous permettions maintenant de comparer l’écrivain et l’éditeur typiques. L’écrivain est généralement AIS tandis que l’éditeur possède souvent un profil ESC : Entreprenant, Social et Conventionnel. Pour un caractère Entreprenant : « Cette dimension fait référence au besoin d’ouverture, de prise de risque, au désir d’influencer les autres et de les persuader en leur vendant ses idées (ou des objets). » 3. Si nous précisons en combinant les deux premières lettres du profil, soit ES, ces personnes sont « … attirées par les activités qui leur permettent d’exercer de l’influence sur les autres.4 ».

Chez un artiste, la création est intrinsèquement plus importante que la gestion et la structuration pour l’atteinte d’un objectif. La valeur littéraire des œuvres n’est qu’un des aspects de l’édition tandis que pour un écrivain, elle peut primer sur le reste. Mais, encore une fois, tout un chacun possède de multiples facettes qu’il pourra exprimer dans l’écriture.

Partie 2 : PERSPECTIVE DU LECTEUR

Références

1 Vous êtes déprimé? Écrivez!

3 ATOUT MÉTIER Central test. Profil de Vincent. Septembre 2012.

http://www.centrelavenir.ca/sites/centrelavenir.ca/www/IMG/pdf/Liste_de_metiers_et_professions.pdf

2 Bordeleau, F. (1996). La formation de l’écrivain. Lettres québécoises, (82), 11–14.

http://plus.lapresse.ca/screens/0453a6d2-a081-4c44-8ebb-4e5a01105f41%7C_0.html

6 http://www.journaldemontreal.com/2016/01/12/le-quebecanalphabete

7 https://www.journaldequebec.com/2016/10/04/27-des-diplomes-universitaires-sont-analphabetes-fonctionnels

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